Le cardinal Anthony Poola sur Dignitas Infinita : « N’oubliez pas la question du drame de la pauvreté »

Le cardinal Poola, archevêque d’Hyderabad, invite à se préoccuper aussi de la pauvreté parmi les questions soulevées par le document du Vatican sur la dignité humaine. Le cardinal Poola, archevêque d’Hyderabad, invite à se préoccuper aussi de la pauvreté parmi les questions soulevées par le document du Vatican sur la dignité humaine. © Archidiocèse d’Hyderabad
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Alors que débutent les élections indiennes, le cardinal Poola, archevêque d’Hyderabad, observe les réactions des médias face à la nouvelle déclaration du Vatican sur la dignité humaine. Alors que les médias sont « focalisés sur les questions comme la théorie du genre, le changement de sexe et la GPA », il invite à ne pas oublier la question du « drame de la pauvreté » soulevée par le document, et à se confronter au contexte socioculturel et religieux derrière le fait que « tant d’Indiens vivent encore dans des conditions inhumaines ».

Pour le cardinal Anthony Poola, archevêque d’Hyderabad, le fait de se concentrer seulement sur les questions bioéthiques, c’est offrir une lecture partielle (et trop facile) de Dignitas Infinita, la déclaration doctrinale sur les droits de l’homme publiée lundi 8 avril. L’évêque commence son analyse en commentant les réactions générées par le document du Vatican en Inde et au-delà. Il est bon de noter que le cardinal Poola est le premier Indien originaire d’une famille Dalit (autrefois appelés « hors-castes » ou « intouchables ») à être devenu cardinal, lors du consistoire présidé en 2022 par le pape François.

En raison de sa connaissance directe d’une forme de négation de la dignité humaine, vécue par les Dalits, son témoignage prend une signification particulière. Selon lui, le document publié par le dicastère pour la Doctrine de la foi reflète pleinement le large regard que porte l’Église catholique sur la dignité humaine, à la lumière de la tradition et des enseignements bibliques, et la dimension que prend ce regard dans différents domaines de la vie.

Mais il estime que « les médias internationaux ainsi que les journaux indiens sont largement focalisés sur la théorie du genre, le changement de sexe, la GPA, etc. ». « Les enseignements doctrinaux couvrent des domaines beaucoup plus vastes que cela, et ceux-ci doivent être explorés. Des sujets comme la pauvreté, le travail des migrants, les violences, la traite des personnes et les abus sont des questions brûlantes qui méritent une attention urgente dans le contexte indien », souligne l’archevêque d’Hyderabad.

« Il est plus difficile de parler de problèmes dont nous faisons tous partie »

« Cela ne fait aucun doute qu’à travers tout le pays, la dignité de plusieurs millions d’habitants est violée alors que tant de gens sont confrontés à la pauvreté, à l’exploitation, aux discriminations, au manque d’accès aux soins primaires et à l’éducation, au déni de leurs droits, etc. », poursuit-il. Le cardinal Dalit ajoute que Dignitas Infinita « nous défie, particulièrement l’Église », à entamer une réflexion « sur le fossé grandissant entre les plus riches et ceux qui sont privés de tout, sur ceux qui migrent pour fuir et survivre, sur la normalisation de la violence, sur ceux qui vivent aux périphéries et dont les vies ne comptent pas ».

À la lumière des valeurs évangéliques, le cardinal indien suggère de se confronter aux pensées et aux schémas socioculturels et religieux qui expliquent pourquoi tant d’Indiens vivent encore dans des conditions inhumaines, « afin de trouver des solutions pour assurer que leur inviolabilité et leur dignité soient reconnues et soutenues », explique-t-il en évoquant quelques-unes des treize problématiques majeures soulevées par le document sur la dignité humaine, dont « le drame de la pauvreté ».

« Parler de questions dont on est plus éloignés peut être plus facile, mais c’est plus difficile de parler de problèmes dont nous faisons tous partie », insiste-t-il. « Réfléchir à la dignité, ou au déni de la dignité d’un migrant vivant à côté de chez soi ou des pauvres du quartier, ce n’est pas facile, mais les recommandations du Vatican nous invitent à placer ces questions au cœur de nos débats. » Pour lui, la déclaration appelle aussi l’Église indienne à se confronter aux causes structurelles de la pauvreté, de l’injustice et de la violence, afin de « trouver des façons de soutenir la dignité » de plusieurs millions d’habitants dans le contexte indien.

(Avec Asianews)