Japon

Le Japon commémore les 80 ans des bombardements atomiques : appels des responsables religieux

Le Cénotaphe des victimes de la bombe atomique, dans l’alignement du Dôme de Genbaku, au Parc du mémorial de la Paix de Hiroshima. Le Cénotaphe des victimes de la bombe atomique, dans l’alignement du Dôme de Genbaku, au Parc du mémorial de la Paix de Hiroshima. © Jennifer Morrow / CC BY 2.0
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Hier, le cardinal Kikuchi, président des évêques du Japon, a célébré une messe pour la paix dans la cathédrale d’Hiroshima, la veille du 80e anniversaire du bombardement atomique de 1945. D’autres célébrations ont lieu aujourd’hui, ainsi que le 9 août qui marque les 80 ans de la deuxième bombe sur Nagasaki. Le Premier ministre Shigeru Ishiba et 120 chefs d’États sont rassemblés à Hiroshima pour les commémorations nationales. Les responsables religieux du pays ont lancé des appels à la paix, à la réflexion historique et au désarmement nucléaire.

Ce mercredi 6 août et le samedi 9 août marquent les 80 ans des bombardements atomiques d’Hiroshima et de Nagasaki, survenus en 1945 à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Avant ces commémorations, trois groupes religieux japonais ont publié différentes déclarations afin de lancer des appels à la paix, au désarmement nucléaire et à la réflexion historique.

Le Soka Gakkai, un mouvement bouddhiste laïc, a notamment publié un communiqué le 1er août, signé par son président Minoru Harada, afin de souligner l’importance de l’abolition des armes nucléaires, de la solidarité des jeunes et du dialogue interreligieux. « Nous croyons fermement que les amitiés forgées par les jeunes des prochaines générations constitueront des fondations solides pour créer un rempart contre la guerre », a déclaré Minoru Harada, qui a survécu aux bombardements de Tokyo survenus à la fin de la guerre.

Il a également cité sa rencontre en mai 2023 avec le pape François au Vatican, où ils ont discuté du besoin urgent d’éliminer les armes nucléaires et de mettre fin à la guerre. « Aujourd’hui, plus que jamais, la communauté internationale doit assurer la transition entre une période caractérisée par la méfiance mutuelle et la militarisation, vers une période où les nations pourront travailler ensemble afin de faire face aux menaces communes et aux défis de l’humanité. »

« Que la menace nucléaire disparaisse »

Les jours précédents, la Conférence épiscopale japonaise (CBCJ) et l’Église unie du Christ du Japon (l’EUCJ, la plus grande Église protestante du pays) ont également publié des messages distincts. L’EUCJ a publié une prière pour la paix à la fin du mois de juillet. L’Église protestante a également confessé son soutien passé à l’agression japonaise durant la guerre, en reconnaissant ses « erreurs morales » et en soulignant ses préoccupations actuelles, y compris face aux sorts des réfugiés, aux tensions à Okinawa et à la menace globale des armes nucléaires.

« Nous regrettons d’avoir été si impuissants. Nous nous repentons d’avoir non seulement commis de grands péchés durant la guerre, mais aussi d’avoir continuellement cédé aux idéologies changeantes et aux perspectives historiques », ajoute le message. « Que la menace nucléaire disparaisse dans le monde entier. »

Les ruines de la cathédrale d’Urakami, détruite en 1945 lors du bombardement atomique de Nagasaki.
Les ruines de la cathédrale d’Urakami, détruite en 1945 lors du bombardement atomique de Nagasaki.
© Ted McGrath / CC BY-NC-SA 2.0

Appel des évêques japonais

Les évêques catholiques japonais ont également exprimé des remords en parlant des complicités de l’Église durant la guerre, et en encourageant les jeunes à poursuivre la paix et à défendre la dignité humaine. « C’est très important et significatif que des jeunes fassent des pèlerinages et se rendent à Hiroshima, à Nagasaki et Okinawa », ont-ils déclaré, en insistant sur l’importance de sensibiliser les jeunes.

« Nous ne devons pas oublier que même avant la guerre Asie-Pacifique, le Japon avait déjà infligé de grandes souffrances aux pays voisins, durant l’ère Meiji, durant les guerres sino-japonaise et russo-japonaise et durant l’empire colonial, entre autres », ont-ils ajouté. Les évêques ont aussi reconnu le soutien de l’Église catholique locale aux guerres japonaises, interprétées à l’époque selon la doctrine de la « guerre juste » (inscrite au Catéchisme de l’Église catholique, sous un ensemble de critères avec des limites à respecter). Les évêques ont ainsi reconnu leur alignement à l’époque avec l’impérialisme japonais.

Une messe pour la paix à Hiroshima et Nagasaki

« Nous devons reconnaître ces faits honnêtement, nous repentir, et aller de l’avant avec ceux qui mèneront les prochaines générations vers la paix », ont-ils poursuivi. La CBCJ a également critiqué la récente remilitarisation du Japon et demandé à nouveau que le gouvernement ratifie le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (signé en 2017 et entré en vigueur en 2021).

« Le pacifisme du Japon est affaibli par des actions telles que la levée de l’interdiction sur les exportations d’armements, ainsi que le déploiement de missiles à longue portée et l’augmentation significative des dépenses militaires », ont-ils conclu.

À Nagasaki, le diocèse a annoncé une messe pour la paix et une procession aux flambeaux qui auront lieu le 9 août au soir dans la cathédrale, dont les cloches sonneront le jour-même à 11h02.

Le diocèse d’Hiroshima a également prévu de célébrer une messe ce mercredi 6 août pour les victimes de la guerre. Une messe pour la paix a également été célébrée hier, mardi 5 août dans la cathédrale d’Hiroshima, en présence du cardinal Kikuchi, archevêque de Tokyo et président des évêques du japon.

Déclarations de paix des villes d’Hiroshima et Nagasaki

Les appels des différentes communautés religieuses japonaises à la réflexion et au désarmement ont été diffusés alors que les autorités nationales et locales finalisaient les préparatifs des commémorations des 80 ans des deux bombes atomiques.

Le 4 août, le secrétaire général du Cabinet du Japon, Yoshimasa Hayashi, a confirmé la participation du Premier ministre Shigeru Ishiba aux cérémonies de commémoration organisées respectivement les 6 et 9 août à Hiroshima et Nagasaki. Une cérémonie nationale en mémoire des victimes de la guerre aura également lieu le 15 août au Nippon Budokan de Tokyo (une arène à l’origine destinée aux arts martiaux, qui accueille de nombreux autres événements).

Shigeru Ishiba doit y prononcer un discours. « Je crois que c’est important de faire quelque chose pour éviter que les souvenirs de la Deuxième Guerre mondiale ne s’estompent et assurer que nous ne fassions plus jamais la guerre », a-t-il déclaré ce lundi 4 août lors d’une session de la Diet, le Parlement japonais.

Toutefois, selon Kyodo News, il ne devrait pas faire de commentaires à l’occasion du 80e anniversaire. Le 2 août, ce sont plutôt les maires d’Hiroshima et de Nagasaki qui ont annoncé leurs déclarations de paix, en appelant à abolir le nucléaire et en mettant en valeur le témoignage des hibakusha, les survivants de la bombe atomique.

Les deux villes présenteront aussi l’œuvre de l’association Nihon Hidankyo, une organisation de survivants qui a reçu le Prix Nobel de la paix l’an dernier. Près de 120 chefs d’État ont fait le déplacement pour la cérémonie d’Hiroshima ce mercredi, et plus d’une centaine sont attendus à Nagasaki.


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