Birmanie : le général Min Aung Hlaing est le véritable gagnant du sommet de Tianjin

Le 31 août à Tianjin lors du sommet de l’OSC, en présence des chefs d’État participant (dont la Russie, l’Inde, la Chine et la Birmanie). Le 31 août à Tianjin lors du sommet de l’OSC, en présence des chefs d’État participant (dont la Russie, l’Inde, la Chine et la Birmanie). © President.az / CC BY 4.0
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Lors du 25e sommet de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) à Tianjin, qui a eu lieu les 31 août et 1er septembre en présence de vingt chefs d’État dont la Chine, l’Inde et la Russie, Pékin a reconnu le général Min Aung Hlaing comme le « président en exercice de Birmanie ». La Chine a également promis de reconnaître la Birmanie comme membre à part entière de l’OCS, consolidant ainsi l’intégration du pays. De son côté, Narendra Modi prévoit d’envoyer une délégation en Birmanie lors des élections de décembre.

Le régime militaire birman a gagné une légitimité renforcée en participant au dernier sommet de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS), qui a eu lieu ce lundi à Tianjin dans le nord de la Chine. Le général Min Aung Hlaing, responsable du coup d’État de 2021 qui a déclenché la guerre civile (qui dure depuis plus de quatre ans), y a reçu une reconnaissance diplomatique significative, non seulement de la part de Pékin mais aussi de New Delhi.

L’accueil prestigieux qui a été réservé à Min Aung Hlaing en Chine comprenait non seulement des tapis rouges et des limousines rutilantes, mais aussi sa reconnaissance officielle en tant que chef du gouvernement de Birmanie. Pour la première fois depuis le coup d’État, le ministère des Affaires étrangères de la Chine l’a désigné comme le « président en exercice de Birmanie » et non comme « dirigeant de Birmanie », un terme que Pékin utilisait depuis quatre ans afin de maintenir une certaine ambiguïté stratégique.

Pour de nombreux observateurs, cette décision légitimise les plans politiques de Min Aung Hlaing, en particulier ceux liés aux élections nationales prévues pour décembre dans quelque 300 circonscriptions, dont beaucoup sont contrôlées par des groupes armés qui font partie des forces de résistance contre la junte. À ce jour, seuls 145 cantons sur 330 ont été sondés.

Selon les observateurs extérieurs, ces élections sont factices, étant donné que l’armée birmane ne contrôle qu’une partie du territoire et qu’elle continue de combattre différents groupes ethniques armés opposés au régime militaire. Précisément pour cette raison, toutefois, le soutien de puissances asiatiques comme la Chine et l’Inde est important pour la junte militaire : alors que les pertes s’accumulent sur le terrain, le général Min Aung Hlaing peut toujours prétendre avoir la mainmise sur le pouvoir.

Les déclarations de Modi semblent refléter un alignement avec la Birmanie

Après avoir rencontré le Premier ministre indien Narendra Modi au sommet de l’OCS, le gouvernement birman a annoncé que New Delhi enverra sa propre équipe d’observateurs afin de suivre le processus électoral. « Durant la rencontre, ils ont échangé sur leurs visions des mesures nécessaires afin d’assurer la paix et la stabilité dans les régions frontalières des deux pays, ainsi que sur la promotion du commerce régional et sur le développement de l’amitié et de la coopération », a déclaré le journal d’État Global New Light of Myanmar.

Modi a souligné la nécessité d’organiser des élections libres et justes, mais en même temps, selon les déclarations du gouvernement birman, les discussions bilatérales ont aussi évoqué la coopération économique, particulièrement au sujet des terres rares dont la Birmanie est riche, ainsi que la production énergétique et la sécurité. Les déclarations de l’Inde semblent refléter un alignement stratégique envers la Birmanie, qui était jusqu’à ce jour exclusivement sous l’influence de la Chine.

Xi a promis d’inclure la Birmanie comme membre à part entière de l’OCS

La participation de Min Aung Hlaing au sommet de l’OCS a également permis la signature d’au moins sept accords avec la Chine, impliquant des entreprises birmanes et chinoises, en particulier concernant des affaires liées à l’armée birmane et à ceux qui travaillent le long des Nouvelles routes de la soie (Belt and Road Initiative) – le vaste projet d’infrastructures lancé par le président chinois Xi Jinping en 2013 dans le but de connecter la Chine au reste du monde.

Même dans ce cas, selon les experts, il est probable que certains des accords aient reçu un soutien tacite de la part de l’Inde, en particulier à propos de l’extension de la Stilwell Road (anciennement Ledo Road), qui relie le nord-est de l’Inde à la Chine via col de Pangsau (Pangsau Pass) en Birmanie. Mais cette semaine, la réussite la plus significative pour Min Aung Hlaing reste la promesse par Xi d’inclure la Birmanie comme membre à part entière de l’Organisation de coopération de Shanghai.

« J’aimerais exprimer ma gratitude pour les conditions pacifiques qui ont été rendues possibles grâce aux efforts de la Chine, qui a fait pression sur les groupes armés dans les régions frontalières pour le développement du nord de la Birmanie », a confié le général birman durant le sommet, en évoquant les régions de l’État Shan actuellement sous le contrôle des milices ethniques – avec lesquelles Pékin maintient différentes formes de coopération malgré leur opposition à la junte militaire birmane.

L’adhésion à l’OCS permettrait à la Birmanie d’être pleinement intégrée au sein des plateformes économiques et de sécurité chinoises. En échange de la participation de la Birmanie à ce projet politique, la Chine pourrait favoriser le développement des infrastructures et des activités économiques et industrielles qui serviraient à ses intérêts stratégiques (comme l’extraction des terres rares, qui est presque entièrement sous le contrôle de Pékin même si les sites en question dépendent de l’armée ou des milices ethniques).

Source : Asianews

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