Vietnam

Les avancées décisives de 2024 pour l’avenir des relations diplomatiques Vietnam-Vatican

Des jeunes catholiques vietnamiens, le 20 novembre à Lang Son (dans le nord du Vietnam). Des jeunes catholiques vietnamiens, le 20 novembre à Lang Son (dans le nord du Vietnam). © giaophanlangson.net
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L’année 2024 a permis plusieurs étapes significatives pour l’avenir des relations diplomatiques entre le Vietnam et le Vatican, à commencer par le début du mandat de Mgr Marek Zalewski comme représentant pontifical résident, qui est arrivé à Hanoï en janvier 2024. La visite en avril de Mgr Paul Gallagher, secrétaire du Saint-Siège pour les relations avec les États, a également « ouvert de nouvelles opportunités ». L’année 2025 pourrait permettre la venue du cardinal Parolin, avant une potentielle visite papale historique.

Les catholiques au Vietnam se souviendront de 2024 comme une année marquante pour l’avancée des relations entre le Vietnam et le Vatican, jusqu’à parler d’une visite pontificale potentielle selon les autorités ecclésiales. La visite officielle en avril dernier de Mgr Paul Richard Gallagher, secrétaire du Saint-Siège pour les relations avec les États, fait partie des « étapes significatives » des relations bilatérales cette année, explique le père Augustine Nguyen Van Du, de l’archidiocèse de Hué (dans le centre du Vietnam). Bien que les liens diplomatiques officiels entre le pays communiste et le Vatican n’ont « pas été pleinement rétablis », le prêtre assure que le monde a été témoin des « liens plus chaleureux » entre les deux parties au cours de l’année passée.

Le dégel des relations Vietnam-Vatican se constate aussi par les fréquentes nominations épiscopales dans le pays, par les rencontres qui se multiplient entre les deux parties, par les promesses des autorités vietnvamiennes de soutenir l’Église locale, ou encore par les rumeurs d’une visite papale potentielle. Le père Augustine, qui a travaillé durant plusieurs décennies en Italie, ajoute que la visite de Mgr Gallagher, une première historique de la part d’un diplomate aussi élevé dans la hiérarchie vaticane, a démontré que les deux parties désiraient approfondir leur relation.

Mgr Paul Richard Gallagher accueilli avec des fleurs, le 9 avril 2024 à son arrivée à Hanoï.
Mgr Paul Richard Gallagher accueilli avec des fleurs, le 9 avril 2024 à son arrivée à Hanoï.
© tonggiaophanhanoi.org

Jusqu’alors, seuls des sous-secrétaires du Saint-Siège s’étaient rendus au Vietnam pour des discussions diplomatiques. Le prêtre vietnamien explique que Mgr Gallagher a « ouvert de nouvelles opportunités pour l’Église locale » afin qu’elle puisse développer ses activités dans un environnement plus favorable. Toutefois, les incertitudes politiques – telles que les démissions de l’ancien président Vo Van Thuong et du président de l’Assemblée nationale Vuong Dinh Hue – ont empêché le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’État du Saint-Siège, de venir à son tour au Vietnam en 2024.

Le cardinal Parolin invité à se rendre au Vietnam en 2025

L’année a débuté avec le début du mandat de Mgr Marek Zalewski comme représentant pontifical résident au Vietnam, qui est arrivé à Hanoï en janvier 2024. Le prélat polonais, basé dans la capitale, a joué un rôle significatif au cours des derniers mois face à différentes problématiques de l’Église locale, et pour faciliter trois nominations épiscopales avec l’accord du gouvernement : des évêques auxiliaires pour l’archidiocèse de Hanoï et le diocèse de Xuan Loc, et un évêque pour le diocèse de Ban Me Thuot. L’arrivée de Mgr Zalewski à Hanoï a marqué un renouveau de l’engagement du Vatican au Vietnam. D’autant plus que les relations entre le pays et le Saint-Siège étaient freinées depuis presque cinquante ans par le manque de représentant permanent.

Le père Augustine Du explique qu’en 2025, le diplomate continuera ses efforts en vue de la nomination d’un nouvel évêque dans le diocèse central de Da Nang, dont le siège est vacant depuis 2023 – quand son évêque Mgr Joseph Dang Duc Ngan a été nommé archevêque coadjuteur de l’archidiocèse voisin de Hué. Le père Du ajoute que les évêques vietnamiens ont déjà soumis une liste de trois candidats au Saint-Siège. Les discussions sont en cours avec le gouvernement vietnamien afin de finaliser la nomination d’un évêque à Da Nang – le seul siège épiscopal vacant au Vietnam à ce jour.

De son côté, le père Augustine souligne que le Vietnam et le Vatican continuent de collaborer afin de construire une relation positive, qui pourrait permettre de voir se concrétiser une visite pontificale historique. Faute de pouvoir se rencontrer au Vietnam, le Premier ministre Pham Minh Chinh et le cardinal Pietro Parolin ont échangé lors du sommet du G20 en novembre dernier, au Brésil.

Selon un rapport du Comité gouvernemental pour les Affaires religieuses (GCRA), M. Chinh a apprécié « la bonne volonté » que le pape François a démontré envers le Vietnam, et il a invité le cardinal Parolin à se rendre dès que possible au Vietnam. Ce dernier aurait accepté volontiers l’invitation, en confiant que le pape François espère également s’y rendre dès que possible, ce qui devrait fortement contribuer à renforcer les liens diplomatiques.

Mgr Zalewski, premier représentant pontifical résident, le 16 février 2024 au Vietnam.
Mgr Zalewski, premier représentant pontifical résident, le 16 février 2024 au Vietnam.
© giaophanhunghoa.org

« Le Vietnam désire sincèrement une visite papale »

Le père Pierre Phan Van Loi, un historien basé à Hué, note quant à lui que l’année 2025 offre plusieurs opportunités pour une visite du cardinal Parolin, le numéro deux du Saint-Siège. Une telle visite pourrait notamment avoir lieu à l’occasion du 32e Congrès national marial, prévu en août 2025 au sanctuaire national Notre-Dame de La Vang, pour l’inauguration de la nouvelle basilique de Notre-Dame de la Vang. « Le Vietnam désire sincèrement une visite papale, dans le cadre de ses efforts pour établir des relations diplomatiques avec le Vatican », assure le père Loi.

Début décembre, le vice-Premier ministre Nguyen Hoa Binh ainsi que Nguyen Tien Trong, vice-président du GCRA, ont également rencontré des représentants basés aux États-Unis de l’Association évangélique Billy Graham (BGEA), de l’Institute for Global Engagement (un institut qui soutient les collaborations internationales) et de la Reid Saunders Association (une organisation religieuse).

À cette occasion, M. Binh a appelé le pasteur Franklin Graham (directeur de l’association BGEA et de Samaritan’s Purse, une ONG internationale évangélique) à continuer de soutenir des projets soutenant les communautés villageoises reculées au Vietnam et venir en aide aux victimes des changements climatiques. De son côté, Nguyen Tien Trong aurait appelé les pasteurs américains à mettre la pression sur le gouvernement américain afin qu’il retire le Vietnam de sa liste de vigilance spéciale (Special Watch List) en matière de liberté religieuse. Le Vietnam est sur cette liste depuis deux ans, ce qui suggère que le gouvernement réprime les pratiques religieuses.

Au moins 7 millions de catholiques sur 100 millions d’habitants

Le pays compte 54 groupes ethniques. Sur près de 100 millions d’habitants, près de 95 % suivent des systèmes de croyances. Plus de 27 millions d’entre eux suivent des religions officiellement reconnues, dont le bouddhisme, le catholicisme, le protestantisme, le bahaïsme, l’islam et l’hindouisme. Les catholiques vietnamiens sont au moins 7 millions. Le reste de la population compte des non-religieux et des adeptes des religions traditionnelles vietnamiennes.

Dans ce contexte et malgré les avancées récentes, certaines organisations affirment que le gouvernement continue de contrôler les activités religieuses, en particulier dans les régions montagneuses du nord et les Hauts Plateaux du centre, où beaucoup de groupes ethniques se sont convertis au christianisme. Selon ces organisations, l’État y réprime les célébrations et rassemblements religieux, ainsi que la nomination de responsables religieux, en invoquant des préoccupations relatives au climat social et aux influences étrangères sur les communautés locales. « Le gouvernement doit se montrer plus tolérant envers les ‘églises de maison’ et les groupes indépendants, s’il veut pouvoir améliorer son image en matière de droits de l’homme », signale un militant souhaitant rester anonyme.

(Avec Ucanews)