Inde

Inde : l’opposition remporte un scrutin historique dans la région sensible du Cachemire

Après des élections régionales très attendues au Cachemire, une alliance victorieuse de l’opposition s’apprête à former le prochain gouvernement local. Après des élections régionales très attendues au Cachemire, une alliance victorieuse de l’opposition s’apprête à former le prochain gouvernement local. © walkingthehimalayas (pixabay.com)
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Une alliance opposée au BJP, le parti nationaliste hindou du Premier ministre Narendra Modi, a remporté les élections dans la région du Cachemire indien. Le scrutin était perçu comme un test important, en particulier dans la vallée himalayenne à majorité musulmane, agitée depuis 1989 par une insurrection et placée, il y a cinq ans, sous tutelle du gouvernement central de New Delhi.

Une alliance formée par la Conférence nationale, le grand parti traditionnel du Cachemire, et le Congrès, le parti national d’opposition de la dynastie des Nehru-Gandhi, a remporté 48 des 90 sièges de l’assemblée locale du Jammu-et-Cachemire, devançant largement le BJP, le parti du Premier ministre Narendra Modi.

Annoncés ce mardi 8 octobre, les résultats électoraux ont été scrutés avec une grande attention. C’était la première fois que des élections se tenaient au Cachemire depuis que cette région a été dépouillée de sa relative autonomie par le gouvernement de Narendra Modi. Peu après la réélection du Premier ministre au printemps 2019, l’État du Jammu-et-Cachemire a en effet été scindé et placé sous tutelle directe de New Delhi. Depuis l’Indépendance, cet État bénéficiait d’une autonomie relative, garantie par l’article 370 de la Constitution indienne. En août 2019, les nationalistes hindous ont brutalement abrogé cet article et rétrogradé le Cachemire en territoire de l’Union indienne. Pour museler les contestations de la vallée himalayenne, l’armée a été déployée, les communications coupées, et les opposants arrêtés en masse.

Un « verdict » contre le gouvernement de Narendra Modi

Depuis, le Cachemire a été administré par un gouverneur nommé par New Delhi. Les dirigeants du BJP n’ont cessé d’affirmer que la région bénéficiait d’un retour au calme et d’un ample développement économique et touristique. Ces affirmations, qui n’auront pas convaincu les électeurs, sont régulièrement contestées par les voix critiques : les incidents sécuritaires se poursuivent, le taux de chômage est élevé et, selon les défenseurs des droits de l’homme, les libertés continuent à être réprimées. La presse étrangère, interdite au Cachemire, n’était toujours pas autorisée à se rendre dans la région dans le cadre de ce scrutin.

L’histoire du Cachemire, la seule région à majorité musulmane de l’Inde, a été jalonnée de revendications séparatistes et d’un rejet de la souveraineté de New Delhi. L’ancienne province, écartelée entre l’Inde et le Pakistan après la Partition de l’Empire britannique, a fait l’objet de trois conflits entre les deux puissances nucléaires ennemies. Depuis 1989, le Cachemire indien est le théâtre d’une insurrection séparatiste qui a fait des dizaines de milliers de victimes. La région reste l’une des plus militarisées au monde, avec le déploiement de près de 500 000 soldats indiens.

Aujourd’hui, l’alliance victorieuse de la Conférence nationale et du Congrès s’apprête à former le prochain gouvernement local. C’est la famille Abdullah, qui se confond avec l’histoire du Cachemire, qui devrait reprendre les rênes de l’exécutif, avec le politicien Omar Abdullah. Son père, Farooq Abdullah, président de la Conférence nationale, a estimé que les résultats des urnes étaient un « verdict » contre le gouvernement de Narendra Modi. À New Delhi, Rahul Gandhi, à la tête du parti du Congrès, a salué une « victoire de la Constitution, une victoire du respect de la démocratie ».

(Ad Extra, A. B.)