Jimmy Lai : la fin d’un marathon judiciaire, en attente de verdict à Hong-Kong

Le 01/09/2025
Ce jeudi 28 août à Hong-Kong, Jimmy Lai a assisté à la dernière séance des plaidoiries finales d’un procès débuté en décembre 2023. L’homme d’affaires catholique, de nationalité britannique et taïwanaise et âgé de 77 ans, est jugé pour « collusion avec des forces étrangères » et « publications séditieuses », dans le cadre de la loi sur la sécurité nationale imposée par Pékin en 2020. Détenu depuis presque cinq ans, ce symbole du mouvement prodémocratie risque la réclusion à perpétuité. La date du verdict n’a pas été précisée.
Malgré une santé dite fragile, l’homme d’affaires de 77 ans, de nationalité britannique et taïwanaise, a assisté le 28 août aux dernières plaidoiries après un long procès débuté en décembre 2023. Détenu depuis presque cinq ans à Hong-Kong en vertu de la loi sur la sécurité nationale, promulguée en 2020 par Pékin, il risque la prison à perpétuité. Son fils Sébastien a déclaré récemment que son père « n’est pas en très bonne santé et pourrait décéder à n’importe quel moment ». « Il s’est sacrifié pour la liberté des Hongkongais », a-t-il confié début 2025, interviewé par France 24.
Qui est Jimmy Lai ?
Comme le rappelle l’agence de presse catholique CNA, Jimmy Lai est un véritable self-made-man, devenu homme d’affaires et patron de presse. Catholique, son empire s’est fondé sur la liberté d’expression et un journalisme authentique – ce qui lui a justement valu d’être placé derrière les barreaux et considéré comme l’un des prisonniers politiques les plus célèbres de la Chine communiste.
Jimmy Lai Chee-ying, appelé Jimmy Lai, est né à Guangzhou, en Chine, en 1947 durant la guerre civile chinoise. Après la victoire du Parti communiste chinois (PCC), sa mère a été envoyée dans un camp de travail, le laissant seul avec ses frères et sœurs. À l’âge de 12 ans, il a pu embarquer en cachette sur un bateau en partance pour Hong-Kong, échappant ainsi à la Chine continentale à la recherche d’une vie meilleure. Arrivé sans le sou, il a trouvé du travail dans une usine de textile, où il a gravi les échelons.
À Hong-Kong, Jimmy Lai a constaté les demandes de tenues abordables et de qualité. Il a donc fondé une chaîne de boutiques de vêtements appelée Giordano, qui a été très lucrative. Ces fonds lui ont permis de fonder le conglomérat médiatique Next Digital. Cette société de presse, devenue la plus importante de la ville, était à l’origine de la publication hebdomadaire populaire Next Magazine.
Après ce succès, Jimmy Lai a fondé le journal Apple Daily en 1995. Ce tabloïd était connu pour sa ferme position prodémocratie et sa couverture critique sur la Chine et le gouvernement de Hong-Kong.
Entre son succès dans le secteur de la mode et la popularité de sa société de presse, Jimmy Lai est passé littéralement de la misère à la richesse. Ainsi, en 2008, il était dans le classement Forbes des milliardaires, avec une fortune estimée à 1,2 milliard de dollars. Malgré cette situation, il a tenu à mettre l’accent sur la famille, la foi et les principes de la démocratie et de la société libre.
Il décide de rester à Hong-Kong en 2020
À travers ses publications et ses autres travaux militants, Lai est devenu une voix critique virulente du PCC. Son activisme en faveur de la liberté d’expression a entraîné sa première arrestation, le 10 août 2020, lors d’un raid de police dans les bureaux de son journal dans le cadre de la nouvelle loi sur la sécurité nationale. La loi, votée par le gouvernement hongkongais contrôlé par le PCC, a fortement limité la liberté d’expression, dans le but de mettre fin à ce que Pékin considérait comme de la subversion. Elle est entrée en vigueur le 1er juillet 2020.
Après son arrestation, Jimmy Lai a d’abord été libéré sous caution en attendant son procès. Il avait alors l’opportunité de quitter Hong-Kong avec sa famille puisqu’il avait la citoyenneté britannique, mais il a décidé de rester, attaché à sa mission et à sa foi. Converti au catholicisme en 1997, il se rendait déjà à l’église avec son épouse catholique, Teresa, des années avant sa conversion. Il a été baptisé par le cardinal Joseph Zen, évêque émérite de Hong-Kong.
Après avoir décidé de rester à Hong-Kong, il a déclaré : « Si je pars, je renonce non seulement à mon destin, mais j’abandonne aussi Dieu, ma religion, ce en quoi je crois. Je suis ce que je suis. Je suis ce que je crois. Je ne peux le changer. Et si je ne peux le changer, je dois accepter mon sort avec gratitude. »
Lai a été à nouveau arrêté en décembre 2020 sur accusations de fraudes, et sa libération sous caution a été refusée. Durant les années suivantes, il a continué de subir des condamnations alourdies pour différentes accusations dont des rassemblements et manifestations non autorisés, d’autres accusations de fraudes, ou encore pour avoir participé aux veillées en mémoire des victimes du massacre de 1989 (survenu place Tiananmen à Pékin).
La suite du procès
Son procès en vertu de la loi sur la sécurité nationale devait débuter en 2022, il a finalement été retardé jusqu’au 18 décembre 2023. Il a continué d’être repoussé et Lai s’est vu refuser la libération sous caution malgré de nombreux appels. Quand son procès a enfin débuté, il a plaidé « non coupable » des accusations de collusion avec des forces étrangères et de publication de contenus séditieux.
La procédure judiciaire devait durer 80 jours, mais a finalement duré jusqu’au 11 juin 2024, avant qu’elle soit à nouveau reportée au 20 novembre 2024. L’affaire a été maintes fois interrompue par le gouvernement sous prétexte de « soucis de santé » et de « mauvais temps ».
En prison, Jimmy Lai s’est attelé à la lecture biblique et à la prière, créant même des œuvres artistiques religieuses dont des crucifixions du Christ. Il a été placé à l’isolement durant plus de quatre ans, où il n’a pu recevoir l’Eucharistie et a subi des conditions de détention inhumaines.
Après les dernières plaidoiries entendues fin août par le tribunal, la date du verdict n’a pas été précisée, mais il ne devrait pas être annoncé avant octobre. L’équipe juridique de Jimmy Lai a confié précédemment qu’elle s’attend à ce qu’il soit inculpé, étant donné qu’il est poursuivi dans le cadre d’une loi qui « incrimine essentiellement la dissidence ».
C’est pourquoi tout espoir repose sur les aides internationales qui pourront contribuer à sa libération. Des évêques catholiques du monde entier se sont exprimés en appelant à sa libération, ainsi que de nombreux dirigeants politiques. En août, le président américain Donald Trump s’est notamment engagé à faire « tout son possible » pour sauver Jimmy Lai d’un emprisonnement injuste. La famille de Lai s’est aussi engagée à faire connaître son histoire en se battant pour sa libération.
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Sources : CNA, Asianews