Léon XIV : le gouvernement pakistanais n’a envoyé aucun représentant chrétien à la messe d’inauguration

Le 21/05/2025
Les chrétiens pakistanais ont critiqué leur gouvernement qui n’a nommé aucun représentant chrétien dans la délégation nationale pour l’inauguration du pontificat de Léon XIV, le 18 mai au Vatican. Les trois membres de la délégation étaient Yousaf Raza Gilani (musulman et président du Sénat), Kheal Das Kohistani (hindou et ministre d’État pour les Affaires religieuses) et Ramesh Singh Arora (sikh et ministre pour les Affaires des minorités du Pendjab). La délégation aurait été choisie par le Premier ministre Shehbaz Sharif.
Le 18 mai, des groupes et militants chrétiens ont manifesté à Lahore afin de dénoncer cette omission comme « profondément embarrassante » pour les quelque 3 millions de chrétiens. Ils se sont rassemblés devant le Lahore Press Club après la messe dominicale en chantant « Shame, Shame » et en dénonçant un manquement « délibéré ».
« Cela fait partie de la marginalisation généralisée des chrétiens au Pakistan », affirme Aslam Pervaiz Sahotra, président du parti chrétien Massiha Millat. « Les chrétiens sont mis à l’écart. Une représentation de la communauté chrétienne pakistanaise était essentielle pour un tel événement symbolique et spirituel », regrette-t-il en songeant aux persécutions et aux discriminations contre la minorité chrétienne au Pakistan. Il se demande pourquoi le gouvernement a nommé un hindou et un sikh « pour une cérémonie religieuse purement chrétienne », et non deux élus chrétiens du Parlement pakistanais.
Le pasteur Amjad Niamat, président de la Commission pour l’œcuménisme et l’Harmonie interreligieuse de l’Église presbytérienne du Pakistan, a également condamné la décision du gouvernement. « Les membres de la communauté chrétienne au Pakistan – y compris les évêques, les pasteurs et les responsables laïcs – auraient dû avoir l’opportunité de représenter à la fois leur communauté et leur nation », a-t-il souligné dans un communiqué publié le 17 mai.
Selon Amjad Niamat, la participation de la délégation pakistanaise à une cérémonie aussi symbolique n’avait aucun sens sans la présence de représentants chrétiens. « Une telle exclusion reflète un mépris de la dignité et de la voix des minorités chrétiennes du Pakistan », a-t-il insisté, en attirant l’attention de la communauté chrétienne internationale sur cette omission. « Nous sommes unis dans cette demande d’être représentés de manière légitime. Notre communauté a une longue histoire de paix, de patriotisme et d’harmonie interreligieuse. »
Le cardinal Coutts a pu représenter les chrétiens pakistanais
De son côté, l’ancienne avocate chrétienne Marie James Gill voit cette omission d’une manière différente. Elle a publié une photo du cardinal pakistanais Joseph Coutts aux côtés de la délégation officielle sur sa page Facebook, avec cette légende : « Hindous, musulmans, sikhs et chrétiens, tous représentaient le Pakistan à la cérémonie d’inauguration au Vatican. C’est mon Pakistan. » Le cardinal Coutts, âgé de 79 ans, est le seul cardinal pakistanais à avoir participé au conclave qui a élu Léon XIV.
Selon Marie Gill, l’assassinat du ministre catholique pakistanais Shahbaz Bhatti en 2011 a laissé un vide dans la communauté chrétienne. « Depuis, aucun autre représentant politique chrétien avec une réelle stature diplomatique n’est apparu pour nous représenter sur la scène internationale », estime-t-elle. Shahbaz Bhatti était membre de l’Assemblée nationale et ministre fédéral pour les Affaires des minorités. Il a été tué par balle à Islamabad à cause de ses critiques ouvertes des lois sur le blasphème.
L’avocate Gill appelle les chrétiens à voir le Vatican avec une vision diplomatique plus large. « Ce n’était pas seulement un événement religieux. Il y avait aussi une forte dimension diplomatique. Nous ne pouvons pas en faire une question communautariste. » Elle invite aussi à éviter de politiser la participation des représentants hindous et sikhs. « Ce genre de réaction heurte l’unité interreligieuse. Les ministres n’ont pas participé au nom de leur confession mais en tant que représentants de l’État. Évitons de nuire au processus de reconnaissance que le Pakistan essaie d’entreprendre sur la scène internationale. »
(Avec Ucanews / Kamran Chaudhry)